C’est le tableau dressé par le dernier Suivi des tarifs de fret maritime (T4 2025) de Transport Intelligence, qui rapporte une forte chute sur les principales routes est-ouest et un marché en quête d’un nouvel équilibre.
L’indice mondial des tarifs de fret maritime de Ti montre qu’en octobre 2025, les tarifs de tête de ligne sont tombés à 106,1, tandis que les tarifs de retour ont atteint 82; tous deux à leur niveau le plus faible depuis 2023. Selon le rapport, les tarifs de tête de ligne ont chuté de 13,9% d’un mois sur l’autre et de plus de 51% d’une année à l’autre.

Ces baisses ne sont pas simplement graduelles mais se caractérisent par des fluctuations soudaines. Le rapport souligne que les tarifs sur certaines voies ont chuté de près d’un quart en un seul mois plus tôt dans la période, soulignant à quel point le marché est devenu instable.
La correction la plus marquée est visible sur les itinéraires Asie-Europe :
- Baisse de 53,4% d’un trimestre à l’autre,
- Déclin de 4,3% d’une année à l’autre.
Pendant ce temps, le commerce de tête de ligne transpacifique a vu la plus grande baisse globale, avec des tarifs spot de tête de ligne en octobre en baisse de 65,5% d’une année à l’autre après un chargement anticipé qui a provoqué un pic temporaire en mai et juin. Même le transatlantique, généralement plus stable, n’a pas échappé à la pression : les exportations de l’Europe vers la côte est des États-Unis ont chuté de 8,6% d’une année à l’autre en août.
L’Europe stagne tandis que la demande américaine soutient les volumes mondiaux
Malgré les tensions géopolitiques et un contexte macroéconomique difficile, les volumes mondiaux de conteneurs ont augmenté de 4,8% d’un trimestre à l’autre. Mais la comparaison d’une année à l’autre raconte une autre histoire : le débit mondial est encore 4,1% inférieur à celui du troisième trimestre 2024.
La situation régionale explique pourquoi :
- Amérique du Nord : Les volumes ont bondi de 12,3% d’un trimestre à l’autre, aidés par une consommation américaine résiliente, un moteur clé de son économie.
- Europe : Pas de croissance d’un trimestre à l’autre. Les volumes restent 4% inférieurs à il y a un an, reflétant des ventes au détail faibles, des consommateurs prudents et un secteur manufacturier qui est passé de la contraction à la stagnation.
- Asie : Les volumes ont augmenté de 2,9% d’un trimestre à l’autre, mais restent inférieurs de 6% d’une année à l’autre, reflétant le ralentissement de l’économie nationale chinoise et des ventes au détail en baisse.
Cet déséquilibre signifie que la demande n’est tout simplement pas assez forte en Europe et dans certaines parties de l’Asie pour absorber la quantité de capacité que les transporteurs ont apportée sur le marché.

Plus de navires que de cargaison : la capacité continue d’augmenter
Selon le rapport, la flotte mondiale de conteneurs continue de s’étendre rapidement. En octobre 2025, la capacité mondiale hebdomadaire approchait les 5 millions d’EVP, en hausse de 2,7% d’une année à l’autre, avec le seul troisième trimestre en hausse de 3,4% par rapport au deuxième trimestre.
Derrière cette croissance se cache une vague de nouvelles méganavires livrés et un carnet de commandes important :
- Près de 10 millions d’EVP de nouvelle capacité sont en commande, soit environ 30% de la flotte mondiale actuelle.
- La flotte de MSC a dépassé les 7 millions d’EVP, un nouveau record dans l’industrie.
- D’autres transporteurs, tels que Hapag-Lloyd, Maersk et ONE, continuent de recevoir de grands nouveaux navires.
Avec une démolition pratiquement absente et des niveaux de flotte inactive faibles, les transporteurs n’ont eu d’autre choix que de déployer ces navires, renforçant la surcapacité qui continue de faire baisser les tarifs sur toutes les grandes voies est-ouest.
La situation pourrait être encore amplifiée par la reprise des itinéraires du canal de Suez, ce qui augmente encore plus la capacité effective.
Le carburant devient moins cher mais ne change pas l’ensemble du tableau
Les prix du fioul ont fortement baissé dans toutes les régions au troisième trimestre et en octobre, les prix moyens mondiaux ayant diminué de 15,9% d’une année à l’autre, les Amériques enregistrant la plus forte baisse, à 20,8%.
Cette baisse est due à :
- Une demande plus faible de fioul marin
- Une production de raffinerie plus élevée
- Des références pétrolières plus douces
Cependant, un carburant moins cher ne peut pas, à lui seul, contrer la force de baisse beaucoup plus importante de l’excès de capacité.
Sentiment du marché : points de vue partagés sur l’évolution des tarifs
L’indice de sentiment de Ti peint un marché incertain, fragmenté et sensible aux dynamiques régionales.
Les répondants s’attendent à :
- Asie-Europe : Principalement des augmentations légères ou modérées au cours des trois prochains mois (56,8%).
- Asie-Amérique du Nord Côte Ouest : Presque une égalité entre ceux qui s’attendent à des augmentations (45,5%) et des baisses (43,2%).
- Europe-Côte Est des États-Unis : La plus grande part (46,3%) s’attend à une baisse modérée des tarifs.
Bien que 53,1% des répondants dans le monde s’attendent à une forme d’augmentation, les attentes sont modestes et fortement dépendantes des conditions spécifiques à chaque couloir.
Perspective : tarifs doux à venir, mais les transporteurs pourraient intervenir
Le rapport conclut que la croissance de la capacité reste la force dominante façonnant le T4 2025. La croissance de la flotte d’environ 9% par an continue de dépasser la croissance de la demande de 2 à 3%. Avec la haute saison en grande partie derrière l’industrie, les transporteurs font face à un marché doux à l’approche de la fin de l’année.
Ti s’attend à :
- Des tarifs stables ou en baisse au T4 2025
- Des annulations de navigations agressives alors que les transporteurs tentent de gérer l’offre
- De nouvelles GRIs alors qu’ils tentent d’arrêter la chute sur les marchés au comptant
- Une volatilité continue, car la récente trêve commerciale entre les États-Unis et la Chine n’offre qu’un soulagement temporaire
La question de savoir si ces mesures menées par les transporteurs réussiront effectivement reste incertaine. Comme le note Ti, l’ampleur de la nouvelle capacité entrant sur le marché peut simplement être trop importante pour que les ajustements opérationnels contrebalancent.
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